Dimanche 15
Arrivée au Pays du Soleil Levant à l'Aéroport de Beijing. Je suis rompu par 11 heures de vol au cours desquelles je n'ai pas dormi (comme d'habitude). Le vol se passe sans encombre.
Puis, le moment tant attendu arrive enfin. Les roues du Boeing grattent la piste de Pékin et mon coeur se soulève quand je réalise que je reviens dans les traces de Marco Polo, près de 700 ans plus tard.
Mon taxi s'engoufre dans les rues chargées de Pékin. La règle ici c'est: pas de règle ! Les voitures, les pousse-pousse, les vélos, les motos, les piétons, les camions pourris, les bus, les taxis, etc. tout se mélange gaiement. Pékin s'étend sur 15'000 km² (moitié de la Belgique), une population de 18 millions d'habitants (double de la Belgique) et 4 millions de voitures (la population de la Wallonie) ! Je ne suis plus à Wépion, c'est certain.
Mon hotel (SwissHotel) 5* est plutôt agréable. On se plaindrait pour moins. Je suis au 12ième étage de la tour avec une vue imprenable sur le trafic incessant des voitures sur les axes routiers infernaux à 2 fois 4 bandes. Après une courte sieste de principe, je décide de partir visiter la ville. Il faut que je sente l'ambiance au plus vite. Je décide de prendre le métro et d'aller voir la fameuse Place de Tian'Anmen où s'érige la non moins célèbre Cité Interdite. Le métro est impressionant. Plus moderne que celui de Bruxelles, un panneau d'affichage élecronique indique en temps réel où se trouve la rame. A ce propos, il faut savoir que les Jeux Olympiques qui se sont tenus à Pékin en 2008 ont fait beaucoup pour modernier la ville.
La Cité Interdite est localisée en plein centre de la ville. C'était la résidence de l'Empereur de Chine jusqu'à la révolution Communiste dans les années 1920. Composée de 9.999 chambres pour les courtisans, l'Empereur s'entourrait de 3.000 femmes et eunuques à son service personnel. On remarquera qu'au fronton de la Cité Interdite, un portrait de Mao est toujours exposé. Il est une grande figure très respectée en Chine.
La police, l'armée, les gardes civils, les gardes publics, Pékin est parsemé d'hommes en uniforme. La ville est ultra-contrôlée mais c'est loin d'être dérangeant. La gentillesse de ces mêmes personnes ne laissent rien craindre. Ils sont là pour assurer le maintien de l'ordre. C'est d'ailleurs une ville très sûre, du moins dans les zones fréquentées que j'ai visitées.
Les véhicules en tout genre parcourent la ville dans tous les sens. Je l'ai dit plus haut, le pousse-pousse dans sa version moderne est partout: le vélo avec remorque est le véhicule le plus courant juste après la voiture. On voit souvent la remorque utilisée pour transporter des marchandises ou l'épouse.
Je suis allé me perdre dans la ville, comme j'aime tant le faire. Cela m'a permis de rencontrer des artistes peintres Chinois. J'ai bien failli me laisser tenter par l'achat d'une toile moderne très intéressante. Mais j'ai resisté bravement. Dans la foulée, mon estomac a réclamé sa pitance. Non loin du quartier des artistes, je suis tombé sur un marché intriguant. Des échopes sur 500 m proposent des mets en tout genre... en tout genre, je dis bien ! On trouve par exemple des brochettes de scorpion. Je me suis contenté d'acheter du poulet, que je n'ai d'ailleurs pas réussi à finir, tant le goût était intriguant... voire inquiétant !
J'aime les nouvelles expériences, voire celles qui sont d'ordre culinaire. Toutefois, ma faim était à la hauteur de la prudence qui est de mise quand on débarque dans une nouvelle culture. Je préférais attendre de rencontrer mon correspondant business, Xin Li, pour qu'il m'initie aux subtilités de la table chinoise. Je cherchai donc un restaurant digne de ce nom. Quittant les petits quartiers non-touristiques, comme je les aime tant, je m'engoufrai donc dans une zone commerciale comme il y en a tant à Pékin. Croyez-moi, tout est grand, lumineux de néons criards, sonore de musique incessante et de slogans commerciaux. Le pays a pris la voie de la politique de marché et il nous dépasse déjà. Le centre commercial dans lequel je rentre est immense et regorge de toutes les marques connues sur Terre. Au passage, un policier vient me demander de ranger mon appareil photo. Interdiction de graver le magasin sur pellicule... la photo suivante est la seule que j'ai pu prendre, car tout bon voyageur respecte les coutumes locales.
Vous avouerez que ce magasin a de la gueule. Il m'a fallu une paire d'heures pour faire le tour des quelques étages. Mais j'ai trouvé un restaurant qui m'a bien inspiré. Son nom: "The Silk Road". Traduisez: "La route de la soie". Je n'ai pas hésité une seconde. Je suis rentré. Le style était magnifique. Et pour ne pas gâcher le plaisir, les toiles accrochées aux murs étaient vraiment très intéressantes.
Les baguettes allaient devenir mes compagnons de voyage pour un bon bout de temps. Le met que j'ai mangé était délicieux. Une omelette aux champignons préparé dans un plat comprenant des galets de rivières. Oui, vous lisez bien. Je vous laisse regarder le petit film que j'ai pris à votre intention.
C'est pas tout ça, mais j'avais le décalage horaire dans la figure, sans une heure de sommeil depuis preque 48 heures. Je décidai d'en finir avec mon exploration du dimanche et je rentrai dans mon superbe hotel. Je passai une nuit réparatrice et importante car le lendemain commençait le vrai travail d'exploration commerciale en Chine !
Mercredi 18
Ma rencontre avec mon correspondant technique est très intéressante. Ingénieur de mon âge, nous avons un bon contact et il me donne confiance. Vient alors le mercredi, mon départ pour la ville de Shangai. Mon excitation est à la hauteur de ma fatigue.
Dans l'aéroport de Pékin, un groupement d'employés s'est massé devant l'entrée du magasin. C'est le genre de réunion très courante le matin avant de commencer à travailler. Le chef donne ses instructions à ses équipiers, tout le monde rangé en rangs d'oignons. J'avais déjà vu ce genre de chose au Japon. Je vous assure que le respect et l'obéissance est de mise. Le chef parle, les mouches volent. Et les avions aussi. Nous nous envolons pour Shangai.
Ma réunion commence rapidement après mon arrivée sur place mais la ville me surprit immédiatement par des immeubles écrasants, des gratte-ciels partout, des architectures lumineuses, et pourtant, dessous les ponts en béton et les immeubles qui grattent les nuages, on trouve une "sous-ville" dont l'architecture est restée ancienne, pauvre et délabrée. La pauvreté est partout. Les Buick cotoient les pousse-pousse et le contraste avec Pékin est total. Shangai n'a pas subi de lifting comme Pékin, Jeux Olympiques 2008 obligent !
Je n'ai malheureusement que peu de photos. Mon temps sur place était très restreint et je suis allé au restaurant avec mes clients directement avec la réunion sans pouvoir m'emparer de mon appareil photos. Mais devant un wishky on the rock au 22 ième étage de mon hotel, j'ai pu admirer les lumières de la nuit sur Shangai.
Vendredi 20
Après un crochet par l'Université de Jilin, dans le Nord de la Chine, faisant des sauts de 1000 km à chaque fois avec mes vols, je reviens à Beijing. Mon hotel a changé. Il s'agit cette fois d'un grand théatre faisant également hotel 4*. Le vendredi est consacré à une rencontre avec l'Université de Pékin. Je dois y donner, comme tous les jours depuis le début de la semaine, une présentation. Mais comme hier, je me retrouve devant une classe d'une trentaine d'étudiants ingénieurs accompagnés de leur professeur, Directeur de l'Université. J'adapte donc mon discours et plutôt que de faire un exposé technico-commercial, leur donne ce qui ressembla plus à un cours de mécanique numérique. J'ai pris un énorme plaisir à me retrouver comme quelques années en arrière, quand j'étais assistant professeur. J'ai tenté de créer l'émulation au sein de l'attroupement et j'ai retrouvé les sensations très agréables d'un contact interactif avec une classe. A la fin de mon exposé, le Directeur m'a offert un cadeau, ce qui a eu l'art de m'émouvoir énormément. Une photo immortalise cet instant magique.
Mon correspondant Chinois et moi allons manger au restaurant une dernière fois. Nous nous promettons de rester en contact étroitement pour faire fructifier le business en Chine. Le repas que nous mangeons ce soir-là est particulièrement bon, surtout le poisson qui baigne dans les piments. C'est le grand plat que l'on voit trônant au milieu de la table. Mon estomac réagit étrangement bien malgré que cela fait une semaine qu'il mange très épicé chaque jour !
Samedi 21
Journée touristique. Je décide de m'offrir des musées. Mais c'est sans compter sur la taille de la ville. Je vais devoir revoir mes ambitions. Je passe malgré tout une merveilleuse journée de découvertes très intéressantes. A commencer par le Gouvernement Chinois. Le bâtiment a son propre parking séparé du commun des mortels (qui fréquente le trottoir) par une ligne blanche épaisse. Cette ligne ne peut être traversée par personne. Et pour vérifier la chose, 5 policiers, 3 militaires et 2 gardes en civil veillent. Croyez-moi, ceux qui la touche d'un millimètre se prenne une remontrance !
J'assiste d'ailleurs à la bravoure d'un quidam qui décide d'aller à contre-courant de l'ordre établi. Il se voit éjecté prestement par la maréchaussée ! Une petite photo prise sur l'instant pour le vivre !
Je distingue ensuite au loin une immense verrière. La taille est impressionante. Je m'approche et vérifie sur la carte. Il s'agit du National Center for Performing Arts. Autrement dit, l'Opéra de Pékin ! Il est évident que c'était là que je devais aller... J'y vais donc et y reste 3 heures, tant le lieu est immense à visiter ! Peyretfitte avait raison quand il disait que Le monde tremblera lorsque la Chine s'éveillera. Quand la Chine fait quelque chose, le moins que l'on puisse dire c'est que ça ne manque pas d'envergure ! L'opéra de Pékin n'a rien, mais absolument rien à voir avec ce que je connais des opéras. Et j'en ai déjà vu un paquet ! Même celui de Buenos Aires, considéré comme le plus grand, fait pâle figure devant celui de Pékin. C'est un avis personnel.
Ultra-moderne, sophistiqué architecturalement, riche en matériaux (type marbres et travertins), immense et démesuré, l'Opéra de Pékin m'a fasciné. J'en ai une centaine de prises de vues, c'est dire ! Le lieu ressemble à un aéroport tant on risque de s'y perdre. Et comme dans les aéroports également, une fouille systématique avec portique de sécurité. Rien n'est laissé au hasard. Après le contrôle, la première verrière. Une longue serre de plus de 100 m.
A ce niveau, à gauche, le musée de l'Opéra Chinois. Endroit passionant pour comprendre les rouages de la dramatique chinoise. Des masques et mannequins de cire donnent une dimension réelle à ce style d'opéra si particulier. A droite de cette même galerie, c'est le musée de l'Opéra Européen qui ne retient pas mon attention pour l'heure.
Au bout de la Galerie, c'est le choc de la hauteur qui me frappe immédiatement. La verrière s'élance vers le haut avec une raideur qui donne le vertige. Là où le verre ne reigne pas, c'est le bois qui s'étale de tout son brun. Le contraste est magnifique.
Je m'engage dans l'escalator pour passer au niveau 0 de l'opéra. Je suis dans ma course vers les hauteurs un groupe de gardes ou policiers, je ne sais trop, marchant au pas forcé et cadencé. J'arrive bien vite dans une cathédrale, rien de moins. Un lieu de recueillement et de méditation pour le mélomane que je suis ! J'en reste bouche bée, interdit même, devant les proportions et la douceur des courbes.
Le matériau qui constitue la surface verticale est en fait une fine cote de maille en acier, telle que portée par les chevaliers du Moyen-Age. Autrement dit, il n'y a qu'un rideau de métal qui sépare les étages supérieurs du vide... ! La seule protection qui empêche que l'on ne s'approche du gouffre est une lourde masse de marbre aux formes douces et sensibles. Tout a été pensé avec une infinie subtilité. Je suis sous le charme.
Pour monter aux étages supérieurs, un ascenceur d'un charme indescriptile se laisse dompter. Les marches automatiques s'enclenchent lentement, ne brusquant pas le pas. L'escalier semble en sustentation dans l'air, comme dans un dessin d'Escher. Les cinq étages se succèdent avec molesse et l'on arrive tout naturellement au point culminant de l'opéra, séparé du vide par une simple plaque de verre, donnant l'impression d'avoir le vide sans autre. Je sens le vertige m'envahir et me griser. Je suis conquis.
La vue est imprenable sur l'arrière d'abord où l'on découvre un petit bassin, un grande goufre de marbre faisant office d'escalier. Les plafonds de bois s'étendent à perte de vue et le contraste des couleurs est terriblement reposant.
On chemine et depuis le 5ième étage, on se penche vers l'avant de l'opéra, le côté orienté face à la Cité Interdite que l'on devine au loin, au travers de la grande verrière. La cafétaria ressemble cette fois à une minuscule couronne perdue au milieu d'un champ de travertins.
Mais le moment le plus époustouflant est sans conteste, de retrouver la grande baignoire, par laquelle je suis arrivé depuis la première verrière. Là où l'escalator m'avait amené au niveau 0. A cette hauteur, cela ressemble à un bateau longeant les fjords du Grand Nord. La blancheur Artctique du marbre pur et les formes parfaites me laissèrent pantois d'admiration. Un véritable régal pour les yeux. Après un passage chez le disquaire, tout simplement immense, je redescends sur Terre.
Le soir-même, je me rendrai à l'Opéra assister à une représentation des plus réussies. Des moments agréables à foison. Je n'avais strictement aucune idée de ce qu'il allait être interprété. Je me fiais à mon instinct. Et ce ne fut pas un mauvais calcul. La salle était sublime. L'orgue était d'une taille comme jamais je n'avais vu. Même l'orgue de Lausanne, récemment construit dans des proportions redoutables, paraissait plus petit ! Tout est démesure dans ce pays fascinant. Tout au long de son histoire, il a montré une innovation en avance sur les autres et des proportions dans ce qu'il entreprend qui remplit d'admiration. La Grande Muraille de Chine en est un exemple.
Dimanche 22
Dernière journée en Chine. Je me lève au chant du coq et passe une paire d'heures dans le bar de l'hotel, le visage sous le soleil sirotant mon capuccino à la façon Chinoise, mais succulant ! Laissons là le chauvinisme italien. Mon humeur est à la ballade. Je décide donc de fuir la ville le temps d'une journée. Comment passer en Chine sans aller gratter les blocs de pierre de la Grande Muraille de Chine ? Je m'engage sur un bus et me voilà parti en exploration, mon Nikkon en bandoulière. C'est probablement la journée la plus impressionante que je vécus de tout mon séjour et de tous les voyages que j'ai pu faire. La Grande Muraille de Chine est un endroit tout simplement halucinant.
Mais je commence par m'arrêter dans un petit village tout proche de la Grande Muraille. Il est réputé pour ses artisans ancestraux qui travaillent le cuivre. Depuis le cuivre brut, en passant par la scuplture, la peinture, le pollisage, je suis le fil de la confection d'une oeuvre d'art. Les mains de ces femmes caressent le cuivre avec une sensualité sans pareil.
Les couleurs minérales confectionées par les artisans eux-mêmes depuis la nuit des temps s'étalent sur la table de l'artiste. A portée de ses mains, elles lui donnent toutes voies d'explorations artistiques et le résultat est magnifique.
Dans ce petit village rural, la vie semble éloignée du brouhaha de la ville. Beijing est à 70 km et on a pourtant l'impression d'être dans un monde totalement différent. Un enfant espiègle passe par là. Son sourire tout simplement candide est fascinant.
Vient l'instant d'aller gravir quelques marches de la fabuleuse Grande Muraille de Chine. A l'entrée ad hoc, un vieil homme s'adonne à un spetacle étonnant. Il allume une immense pipe. On fait également dans la démesure à ce niveau-là ! Son sourire ridé est franc et il ne souffre aucun doute. L'homme est beau dans son uniforme. Observez son regard bienveillant.
C'est le choc lorsque le première regard se porte au loin. Ce qui frappe d'abord c'est la beauté d'un objet pourtant destiné au militaire. Ensuite, c'est la folie qui ennivre. Imaginez 6.500 km de murs pour protéger la frontière Nord de la Chine ! Ce que je visite ne correspond qu'à une infime partie. Pour construire un tel édifice, la Chine a engagé 1/5 de sa population de l'époque. C'est tout simplement un travail titanesque qui laisse pantois d'admiration. Je ne parviens pas encore à réaliser ce que j'ai vu. Est-ce réel que l'homme ait pu faire un tel chef-d'oeuvre, sans outil mécanisé, seulement à la force humaine ? Et ce qui donne un charme fou à tout ce spectacle est ce lit de neige. La couleur blanche qui recouvre le mur rend l'endroit terriblement poétique, oubliant qu'il s'agissait d'une forteresse.